Illégalité d’une fouille accessoire à une arrestation jugée illégale

Leventis c. R., 2022 QCCA 291

[41] En l’espèce, les policiers agissaient sur la foi d’informations reçues d’une source anonyme dont on ignore tout, particulièrement sa motivation et la manière dont elle a obtenu l’information, ce qui impose une grande prudence.  Dans ce contexte, notamment, les policiers ne pouvaient pas tenir pour acquis qu’un crime avait été commis par l’appelant. L’information pointait uniquement un individu que connaissait manifestement l’informateur. Si cela peut, dans certains cas, suffire pour débuter une enquête, il faut plus pour la suite […]

[45] Dans la présente affaire, le seul fait qu’une personne joue avec sa ceinture et reçoit beaucoup d’appels ne peut pas donner des motifs raisonnables justifiant une arrestation. Cela traduirait une norme beaucoup trop faible. Le policier peine à évaluer objectivement la fréquence des sonneries, différentes des messages texte et des appels, de la distinction pertinente entre les deux ou l’absence de pertinence de cette distinction. Plus important, il n’explique pas en quoi les sonneries participaient à former chez lui des motifs raisonnables.

[46] Par ailleurs, […] si l’expérience policière peut contribuer à l’établissement des motifs raisonnables, encore faut-il que la teneur de la formation et de l’expérience policière soient démontrées pour que les tribunaux puissent en tenir compte. En l’espèce, sans qu’il s’agisse d’une critique, la courte explication du policier sur son expérience n’est pas très utile pour objectiver son interprétation hautement subjective. Outre l’affirmation qu’il a participé à quelques arrestations, la nature de son expérience ne démontre pas en quoi ce comportement jouait objectivement un rôle particulièrement distinctif en matière de trafic de stupéfiants.

[47] Le policier avait certainement une bonne intuition, mais insuffisante dans l’ensemble des circonstances expliquées à la juge pour justifier une arrestation.

[49] L’illégalité de l’arrestation emporte l’illégalité de la fouille qui était, en l’espèce, accessoire. Le ministère public n’ayant pas démontré qu’elle pouvait autrement se justifier, cette fouille était contraire aux droits garantis par la Charte […]

[57] Je propose donc d’accueillir l’appel, d’ordonner l’exclusion de la preuve obtenue par la fouille illégale, d’infirmer le jugement de culpabilité et d’inscrire un jugement d’acquittement.

Décision complète disponible ici

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