Crime de menaces de mort ou de lésions corporelles prévu à l’al. 264.1(1)a) C.cr. : le groupe visé doit être suffisamment précis ou déterminé

Veillette c. R., 2022 QCCA 477

[1] L’appelant se pourvoit contre un jugement rendu oralement le 17 novembre 2020 par la Cour du Québec, district de Trois-Rivières (l’honorable David Bouchard), lequel le déclare coupable d’avoir transmis à M. Daniel Morissette une menace de causer la mort ou des lésions corporelles envers le personnel de l’hôtel de ville de Trois-Rivières.

[5]   En se rendant à son institution financière, l’appelant traverse un espace ouvert qui se trouve entre l’hôtel de ville de Trois-Rivières et le parc Champlain et y croise M. Morissette. L’appelant s’approche de M. Morissette d’un pas tranquille et celui-ci, l’apercevant, lui demande comment il va. L’appelant montre alors des signes de colère, puis entame un monologue qui devient de plus en plus agressif. Il raconte s’être fait expulser de son logis, lance sa bouteille d’eau au sol, puis crie à M. Morissette :

Pour me faire comprendre moi, qu’est-ce qu’il faut que je fasse, moi? Il faut tu que je vienne toute vous tirer icitte?

[6] Il mime alors l’utilisation d’une arme longue au niveau de sa poitrine en faisant un demi-cercle en direction de l’espace qui sépare l’hôtel de ville du bâtiment voisin, la bibliothèque municipale. L’appelant s’éloigne, puis reviens vers M. Morissette en lui disant : « Puis moi, là, j’ai même pas assez d’argent pour me tirer moi-même » en mimant un pistolet posé sur sa propre tempe. Il quitte ensuite les lieux.

[10]  Le juge considère que le seul fait que le geste mimé de l’appelant se soit dirigé généralement vers l’hôtel de ville et la bibliothèque municipale suffit à démontrer que la menace qu’il comportait s’adressait au personnel de l’hôtel de ville.

[11]  Avec égard, la preuve ne supporte pas cette conclusion. Outre l’appelant et M. Morissette, aucun employé de la Ville ne se trouve sur les lieux au moment où le geste est commis. Aucune des paroles prononcées par l’appelant ne fait référence à la Ville de Trois-Rivières, à l’hôtel de ville, à ses employés ou aux élus, et la preuve ne montre pas même que l’appelant savait que le bâtiment situé près de l’endroit où il se trouvait était un hôtel de ville ou que le bâtiment voisin était une bibliothèque. La preuve ne montre pas que M. Morissette, qui alors travaillait pour une agence de sécurité privée, portait quelque identification qui aurait permis de l’associer de quelque façon à la Ville de Trois-Rivières ou à l’hôtel de ville. Il n’y a aucune preuve directe ou indirecte d’un lien entre la Ville et l’immeuble duquel l’appelant a été expulsé environ une demi-heure auparavant. Enfin, son arme longue imaginaire était dirigée vers l’espace libre entre l’hôtel de ville et la bibliothèque, et non en direction de ces édifices.

[12] Bref, avec égards pour le juge, la preuve ne permet pas de conclure qu’« […] une personne raisonnable tout à fait consciente des circonstances dans lesquelles les mots ont été proférés ou transmis [et le geste posé] les [aurait] perçus comme une menace de mort ou de lésions corporelles » dirigée à l’endroit du personnel de l’hôtel de ville.

Décision complète disponible ici

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