La Cour d’appel réduit la peine imposée à un délinquant reconnu coupable d’avoir intimidé un policier

Bachou c. R., 2022 QCCA 1145

[35] Avec beaucoup d’égards pour le juge, je suis d’avis qu’il a omis de considérer le principe de modération avant d’envisager l’emprisonnement de l’appelant et qu’il a imposé une peine disproportionnée qui s’écarte de façon marquée et substantielle des peines qui sont habituellement infligées à des délinquants similaires ayant commis des crimes similaires.

[53] […] l’analyse de la jurisprudence que j’ai consultée en matière d’intimidation de personnes associées au système judiciaire révèle que la peine infligée à l’appelant « s’écarte de façon marquée et substantielle des peines qui sont habituellement infligées à des délinquants similaires ayant commis des crimes similaires ».

[55] Bien qu’il ne s’agisse pas d’une règle rigide et inflexible, une peine non privative de liberté doit être considérée lors d’une première infraction criminelle, même s’il s’agit d’une infraction d’intimidation d’une personne associée au système de justice.

[70] Il est vrai que l’article 718.02 C.crimpose aux juges de la peine d’accorder une attention particulière aux objectifs de dénonciation et de dissuasion en matière d’intimidation d’une personne associée au système judiciaire.

[71] Cela dit, trois remarques s’imposent.

[72] Dans la décision récente de la Cour suprême dans l’affaire Bissonnette, le juge en chef Wagner met en garde contre l’infliction d’une peine totalement disproportionnée pour satisfaire un objectif de dissuasion générale […]

[74] Une peine excessive ne saurait être justifiée en raison du besoin distinct de dissuasion spécifique. Comme l’explique le juge en chef Wagner dans l’arrêt Bissonnette : « [l]a peine doit être suffisamment sévère pour dénoncer l’infraction, sans excéder ‘‘ce qui est juste et approprié compte tenu de la culpabilité morale du délinquant et de la gravité de l’infraction’’».

[77] Il est indéniable que le juge pose un regard sévère sur l’appelant, dont il questionne l’introspection et sa victimisation excessive. Il identifie un besoin de dissuasion spécifique. Cela dit, comment justifier une peine d’emprisonnement si sévère pour un délinquant sans antécédents judiciaires au motif de la dissuasion spécifique alors que le degré de récidive est jugé faible même s’il demeure présent?

[78] Dans la mesure où le principe cardinal de la détermination de la peine est la proportionnalité, la dissuasion spécifique requise envers l’appelant ne justifie pas l’infliction d’une peine disproportionnée pour satisfaire cette fin pénologique.

[79] L’alinéa 718.2d) C.cret le principe de modération qu’il garantit imposaient au juge l’obligation de considérer la possibilité de surseoir au prononcé de la peine.

[81] La jurisprudence de la Cour est claire, l’atteinte des objectifs de dénonciation et de dissuasion (générale ou spécifique) s’avère possible en sursoyant à l’imposition d’une peine (communément appelée sentence suspendue) combinée à une ordonnance de probation, y compris dans les cas d’intimidation d’une personne associée au système judiciaire.

[89] La peine juste et appropriée était de surseoir à l’imposition de la peine assortie d’une probation de trois ans comportant l’accomplissement de travaux communautaires.

Décision complète disponible ici

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