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Réouverture d’enquête au stade de la peine afin de déterminer l’aptitude du délinquant

Côté c. R., 2023 QCCA 988

Première étape : les « motifs raisonnables de croire » qu’une évaluation est nécessaire

[39] Il importe de distinguer l’étape de l’enquête visant à établir les « motifs raisonnables de croire » qu’une preuve est nécessaire pour déterminer l’aptitude d’un inculpé de l’étape de l’ordonnance d’évaluation proprement dite. 

[40] […] la première ne repose pas uniquement sur le droit codifié. Elle se fonde également sur les principes de justice fondamentale qui obligent tout tribunal à garantir le respect des intérêts vitaux d’un inculpé. Parmi ceux-ci, il y a le droit à une défense pleine et entière au stade de la peine et celle de ne pas être soumis à une procédure inéquitable en raison de l’absence de connaissance directe, de la part du délinquant, des procédures qui se déroulent devant lui.

[53] Au stade de la peine, l’accusé, maintenant appelé délinquant, jouit du même droit de voir déterminer l’existence de motifs raisonnables de croire que son aptitude est en jeu. Il me semble ne faire aucun doute en droit canadien que l’État ne peut procéder contre un accusé dépourvu de faculté mentale suffisante pour comprendre les procédures engagées contre lui, incluant la détermination de la peine.

[59] En somme, si la question de l’aptitude du délinquant se pose au stade de la peine, il faut y répondre à la première étape selon la norme « des motifs raisonnables de croire ».

[60] Le juge aura alors deux possibilités. La première – et elle ne souffre d’aucune controverse – réside dans la conclusion selon laquelle il n’y a pas de motif raisonnable de croire que l’aptitude du délinquant nécessite d’être examinée. Les procédures inhérentes à la détermination de la peine suivront alors leur cours sans autre forme de vérification. Dans le cas contraire, se soulèvera alors la question de l’ordonnance d’évaluation proprement dite.

Deuxième étape : ordonnance pour déterminer l’aptitude du délinquant

[91] […] [S]i un juge de la Cour du Québec possède des motifs raisonnables de croire qu’une preuve concernant l’état mental du délinquant est nécessaire pour déterminer son aptitude à recevoir sa peine, les articles 721 et 723(3) C.cr. lui confèrent le pouvoir de requérir un rapport comportant un volet principal sur son état de santé mental de la nature d’une évaluation psychiatrique. […]

[94] La suspension de l’instance devrait intervenir seulement si la preuve au dossier autorise le juge à conclure que l’inaptitude du délinquant ne pourra pas se résorber à l’intérieur d’un délai raisonnable apprécié selon les attentes du système de justice en matière d’efficacité.

[95] Si l’inaptitude du délinquant ne s’avérait que passagère, le prononcé de la peine devrait être reporté, le temps pour lui de recouvrer dans un délai raisonnable un état de santé mental suffisant pour lui permettre de recevoir sa peine.

[97] Pour la sécurité du public en général et pour celle du délinquant en particulier, je suggère que l’ordonnance de suspension des procédures soit notifiée au Curateur public dont un aspect vital de la mission est de veiller à la protection des personnes inaptes, au Procureur général du Québec en raison de ses responsabilités générales confiées par la Loi sur le ministère de la Justice et au Tribunal administratif du Québec comme le prévoit l’article 397 C.p.c.

Décision complète disponible ici  

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