Arrêt des procédures confirmé par la Cour suprême du Canada en raison des délais déraisonnables 

R. c. Boulanger, 2022 CSC 2

[7] En ce qui a trait à la deuxième période litigieuse, soit la période de 112 jours entre le 21 mai et le 10 septembre 2019, le moyen d’appel du ministère public doit être rejeté. Les juges majoritaires avaient raison d’intervenir, car ce délai n’était pas entièrement imputable à l’intimé, malgré l’indisponibilité de son avocate à certaines dates.

[8] Certes, la Cour enseigne dans Jordan que lorsque le tribunal et le ministère public sont prêts à procéder, mais la défense ne l’est pas, le délai qui en découle est imputable à cette dernière (par. 64). Tous les acteurs du système de justice criminelle, y compris la défense, doivent adopter une approche proactive afin de prévenir les délais inutiles en s’attaquant à leurs causes profondes (Cody, par. 36). Cela dit, dans certains cas, les circonstances peuvent justifier un partage de la responsabilité pour le délai entre ces acteurs, plutôt que l’attribution de l’entièreté du délai à la défense.

[9] En l’espèce, les parties avaient demandé au juge, aussi tôt qu’en novembre 2018, d’ajouter une troisième date de procès en plus des deux dates déjà prévues en janvier 2019. Leur demande a été refusée. Lors de la première journée du procès en janvier 2019, il devient clair que les deux dates prévues seront insuffisantes, notamment en raison des changements de stratégie de la poursuite. Alors qu’ils discutent de dates potentielles pour la continuation du procès et que l’avocate de l’intimé informe le juge et la poursuite de son indisponibilité pour certaines dates en mai 2019, le juge propose une date en septembre 2019, sur laquelle il insiste, sans considérer la possibilité de continuer le procès à une date plus rapprochée où les parties étaient toutes deux disponibles. Le juge savait donc depuis le mois de novembre 2018 qu’une journée additionnelle serait nécessaire et, en janvier 2019, lorsqu’il évaluait les disponibilités potentielles pour la continuation du procès, la proximité de l’atteinte des plafonds fixés par l’arrêt Jordan devait être prise en compte (R. c. K.G.K., 2020 CSC 7, par. 61). Cela dit, ce n’est pas avant le 7 août 2019 que l’intimé fait part à la poursuite de son intention de déposer une requête en vertu de l’art. 11b) de la Charte canadienne des droits et libertés. Ainsi, outre la conduite de l’avocate de la défense et les changements de stratégie de la poursuite, ce sont les délais institutionnels et le manque d’initiative du tribunal qui ont fait en sorte qu’aucune autre date n’a été offerte plus tôt (motifs du juge Cournoyer, par. 148).

[11] Au final, outre la période identifiée par les juges majoritaires en appel, un délai de 84 jours (période du 1er mars au 24 mai 2018) et un délai de 61 jours (du 21 mai au 31 mai 2019 et du 1er juin au 22 juillet 2019) sont aussi imputables à la défense. Ceci porte le total de jours attribuables à la défense à 225 jours, et le délai net à 950 jours, soit plus de 31 mois. Le plafond Jordan de 30 mois est donc excédé et le délai est présumé déraisonnable. Aucune circonstance exceptionnelle n’a été soulevée pour justifier ce dépassement.

[13] Pour ces motifs, la Cour rejette l’appel et confirme l’arrêt des procédures ordonné par le juge de première instance.

Décision complète disponible ici

 ***

✨ Abonnez-vous à ma veille juridique pour être informé des plus récentes décisions prononcées par la Cour suprême du Canada ainsi que les décisions d’intérêt pour l’avocat.e-criminaliste rendues par la Cour d’appel du Québec.

✨ Rejoignez le groupe privé Facebook Le coin du criminaliste pour connaître les décisions favorables à la défense rendues au Québec, mais également par les cours d’appel canadiennes.

✨ Consultez mon site Internet pour en apprendre davantage sur mes services de recherche et de rédaction en droit criminel.

 

A lire également