La Cour d’appel du Québec confirme l’absolution conditionnelle imposée pour des voies de fait par étranglement dans un contexte conjugal

R. c. Déry Bédard, 2024 QCCA 446

[1] L’appelant se pourvoit à l’encontre d’un jugement sur la peine prononcé le 20 septembre 2023 dans le district d’Alma par l’honorable Jean Hudon, j.c.q. qui, à la suite d’un plaidoyer de culpabilité, avait déclaré l’intimé, David Déry Bédard, coupable d’un chef de voies de fait par étranglement, geste commis à l’endroit de son ancienne conjointe en avril 2020.

[2] Le juge a prononcé une absolution conditionnelle accompagnée d’une ordonnance de probation d’une durée de deux ans pendant lesquels l’intimé sera suivi par un agent de probation, devra suivre les thérapies requises, s’abstenir de communiquer avec la plaignante et sa famille ou de s’approcher de ces personnes en plus de faire des dons et de dédommager la plaignante.

[14] Les conséquences du crime et les faits aggravants sont soupesés par le juge qui retient notamment que l’intimé est l’instigateur de l’agression et que la plaignante a subi des blessures physiques de la nature d’ecchymoses, de même qu’elle en subit des conséquences psychologiques. Il retient qu’elle est suivie par un psychologue, qu’elle souffre d’un stress post-traumatique, qu’elle est anxieuse, qu’elle a fait de l’insomnie et qu’elle doit prendre des somnifères. Il accepte aussi qu’elle fasse des crises de panique, qu’elle ait peur le soir et qu’elle ne fasse plus confiance aux gens. Il accepte aussi l’impact de l’événement sur la fille de la plaignante.

[15] La détermination de la peine est un exercice individualisé […] Le juge était confronté à un crime et à un délinquant. Si le crime est par nature grave, il n’est pas juridiquement exclu qu’une absolution puisse être ordonnée. Le juge avait le bénéfice d’avoir entendu toute l’affaire, incluant les témoins et d’avoir un rapport présentenciel particulièrement exhaustif et minutieux.

[16] Le juge pouvait constater que l’intimé, né en 1977, a deux enfants, vit en couple, est militaire de carrière, fait face pour la première fois à la justice. Le rapport présentenciel note l’importance de l’arrestation, laquelle a suscité chez lui une prise de conscience évidente. L’agente de probation et auteure du rapport écrit que son arrestation « a marqué un point culminant, alors qu’elle lui a permis d’analyser ses propres agissements et de reconnaître les torts qui lui appartiennent ». Toujours selon elle, l’intimé démontre des remords sincères, il reconnaît et nomme les torts causés à la plaignante, il démontre de l’empathie, bref, il fait preuve d’une bonne capacité d’introspection. Selon l’auteure, l’intimé « présente la volonté ainsi que les capacités nécessaires pour fonctionner adéquatement dans le cadre d’une mesure en collectivité ».

[17] Le rapport permettait aussi au juge de constater le sérieux de la prise en main de l’intimé. L’intimé a suivi des thérapies et a consulté des professionnels qualifiés pour traiter des troubles de la personnalité, eux-mêmes diagnostiqués au fil des consultations et qui sont à l’origine de ses comportements répréhensibles. Ses efforts sont non seulement soutenus, mais exigés par son employeur, bien au fait de ses difficultés, tout comme le sont sa famille et sa conjointe actuelle qui l’épaulent dans ce cheminement. Le rapport présentenciel de l’agente de probation est soucieux des dangers habituellement associés aux comportements violents dans un contexte conjugal. L’auteure du rapport a eu accès aux professionnels qui ont accompagné l’intimé dans son cheminement et les commentaires reçus étaient tous positifs.

[18] En somme, le juge était conscient des circonstances de l’infraction. Le sérieux de son analyse ne permet pas de croire qu’il a ignoré les faits admis lors du plaidoyer. Il avait devant lui un crime et un délinquant et il a procédé à un exercice d’individualisation de peine. Si la peine est clémente, on ne peut pas écarter qu’elle répond à la situation particulière dont était saisie le juge. En l’absence d’erreur, le fait qu’une autre peine aurait pu être envisagée par un autre juge ne justifie pas l’intervention d’une cour d’appel.

 

Décision complète disponible ici  

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