Seuls les faits essentiels au verdict de culpabilité prononcé par un jury peuvent être retenus à titre de facteurs aggravants

Guerrier c. R., 2021 QCCA 1327

[9]  Bien que détenu, Michel Barrette […] avait réussi à se procurer du tabac. Il s’agit d’un produit de contrebande prisé que des codétenus ont rapidement voulu lui voler. […] Barrette sera amené dans la cellule de Biji où il sera sévèrement battu. Quelques heures après s’être fait battre, Barrette a succombé à une hémorragie interne importante, notamment de la rate, un organe situé dans la région de l’abdomen […]

[10] […] les appelants Guerrier et Côté ont été déclarés coupables d’homicide involontaire et de voies de fait graves.

[83] Lorsque le procès a lieu devant un jury qui ne motive pas sa décision, l’alinéa 724(2)a) C.cr. dispose que les faits essentiels au verdict de culpabilité, exprès ou implicites, sont considérés comme prouvés et que le juge peut accepter comme prouvés les autres faits pertinents ou permettre aux parties d’en faire la preuve.

[84] Les faits qui ne sont pas essentiels au verdict de culpabilité, exprès ou implicites et retenus par le juge au chapitre des facteurs aggravants, doivent être prouvés hors de tout doute raisonnable […]

[91]  […] à mon avis, la juge commet des erreurs en retenant des facteurs aggravants, soit l’appartenance au comité et la séquestration de la victime. Aucun de ces éléments n’était nécessaire aux verdicts et il fallait les établir par une preuve hors de tout doute raisonnable. Je rappelle que l’intimée n’a présenté aucune preuve dans le cadre de la détermination de la peine, de sorte qu’il faut s’en remettre à la preuve du procès.

[92] La juge retient que Guerrier faisait partie du comité et Côté « s’il n’en [faisait] pas partie, il [agissait] tout comme ». Avec égards pour la juge, si elle y voyait un facteur aggravant, il n’y a pas une preuve hors de tout doute raisonnable que ces deux accusés étaient membres du comité en question. La preuve était un peu plus ambivalente pour Guerrier, mais elle demeurait contradictoire, et elle était inexistante pour Côté. Dans la mesure où l’appartenance au comité avait un poids aggravant aux yeux de la juge, il s’agit d’une erreur.

[93] La juge retient également que Guerrier et Côté auraient forcé la victime à boire un laxatif. Cette preuve est également contradictoire puisque le témoin Émard, sur qui repose la démonstration de ce fait, n’a pas offert la même version à l’enquête préliminaire et au procès.

[95] L’impact des deux erreurs ne peut être ignoré. La facture du jugement indique clairement que ces deux facteurs ont eu un poids dans la peine retenue. Sur ce plan de responsabilité morale et de la durée de l’emprisonnement qui en découle, les distinctions sont forcément nuancées. […] Il s’agit en effet d’un crime qui implique un large spectre de comportements, mais toujours la conséquence la plus grave, la mort. Il n’est pas simple de punir dans ce contexte.

[97] Considérant […] le contexte carcéral et la planification de cette attaque, je suggère d’intervenir pour établir les peines à 13 ans d’emprisonnement.

Décision complète disponible ici.

A lire également